mercredi 3 août 2011

L'abattage rituel



Ce sont deux mondes à part : une vache, dans une chaîne d'abattoirs ordinaire, est un produit qu'on va former » pour la filière viande de l'industrie agro-alimentaire. Elle sera abattue selon une législation et un contrôle stricts.

Dans un contexte rituel, la même vache constitue un don de Dieu aux humains, et sa consommation passe par un sacrifice (en anglais slaughter) selon des modalités très codifiées, mais pas fort légales, surtout si l'on retient le droit européen

L'abattage rituel, qu'il soit israélite ou musulman, repose sur un pilier majeur : le sang est un élément impur qui doit être absolument expurgé de la carcasse, sinon la viande n'est pas consommable. Ceci entraine le sacrificateur à tuer l'animal encore bien vivant et réactif, en coupant d'un geste précis les quatre gros vaisseaux qui irriguent la tête, ainsi que la trachée artère Les mouvements d'agonie ainsi que les demies battements cardiaques permettent une vidange du circuit sanguin en quelques secondes.

Ces sacrifices sont dévolus à des professionnels, formés, et responsables de la qualité de leur matériel.

Voici tout au moins l'argumentaire des responsables religieux, la réalité étant quelque peu différente.

Notons que pour des détails assez ténus, il existe des différences d'appréciation entre religions, et entre groupes confessionnels au sein d'une même religion. Ainsi, toute viande kasher est réputée halal mais l'inverse n'est pas vrai car le matériel des rabbins demande un entretien et des attentions très particulières. De plus, la viande kasher demande une inspection et une préparation sur la carcasse qui ne sont pas exigées pour le label halal.

Le halal est une garantie que le produit a été fabriqué dans des conditions qui excluent tout contact avec du porc ou de l'alcool, et s'il s'agit d'un produit carné, que les animaux ont été abattus selon le rite.

En France, la conception maghrébine malilkite, relativement tolérante sur le halal, s'est imposée. L'essentiel était d'éviter la viande de porc et de ne pas consommer de l'alcool en public. Le verset selon lequel la viande des Gens du Livre (juifs, musulmans et chrétiens) est licite a permis pendant de nombreuses années de consommer ou d'être peu vigilant vis-à-vis de la viande non sacrifiée. Mais une évolution récente, une certaine compétition entre responsables religieux, a entraîné une crispation sur le sujet.

Et cette compétition, elle est également économique, car voici une activité qui rapporte, tant pour la partie « sacrifice » que pour la partie certification, où plusieurs organismes se partagent le marché. Telle la Mosquée de Lyon, qui annonce 900.000 euros de chiffre d'affaire, grâce à une redevance de 4 à 8 centimes le kilo.

Mais il y a un biais dans cette construction : une bonne partie des pièces de viande ne sont pas consommées par les fidèles, en particulier les meilleurs morceaux de l'arrière de la carrasse, ou les abats : ces morceaux sont en fait vendus dans le circuit traditionnel sans que le consommateur soit informé...!

Et voici un nouveau sujet de polémique : pour des gens qui veulent manger de la viande issue d'un abattage avec étourdissement préalable, il y a tromperie.

Car le nœud du problème (et de cet article) est le suivant : l'abattage rituel est-il générateur de souffrance animale, doit-on le banaliser comme c'est actuellement le cas, et y aurait-il des moyens de réunir les parties ?

La première des choses est de pouvoir évaluer la souffrance animale...

Et une fois de plus, c'est notre Descartes national qui a posé les bases d'une compréhension qui a constamment évolué par la suite.

Pour lui, si les humains étaient conçus comme l'union entre une âme et un corps, les animaux, en revanche, ne se limitaient qu'à un corps... ce qui évacuait la question de la souffrance animale : sans âme, donc sans sentiments, pouvaient-ils souffrir ?

Leurs cris n'étaient alors qu'une réaction réflexe d'où l'ouverture aux vivi­sections, très pratiquées au XVIIIème siècle - les physiologistes de la génération de Claude Bernard ont été des grands consommateurs d'animaux de laboratoire, mais c'était pour le bien commun :

« Le physiologiste... n'entend plus les cris des animaux, il ne soit plus le sang qui coule, il ne voit que son idée et n'aperçoit que des organismes qui lui cadrent des problèmes qu'il veut découvrir ».

Et précisément, ces recherches ont finalement montré que la vache comme l'agneau ... comme l'homme, possèdent le même type de système nerveux, avec le même type de fibres, de circuits, et d'encéphale pour interpréter les douleurs. Et du coup, les pauvres rats sur des plaques chauffantes ont servi de révélateurs d'efficacité pour tous les antalgiques destinés à l'Homme.

Douleur, souffrance ou nociception ?

La douleur, c'est une sensation désagréable et une expérience émotionnelle en réponse à une atteinte tissulaire, réelle ou potentielle. Elle est inscrite chimiquement dans le fonctionnement des êtres, ainsi que dans la mémoire, elle peut, à bas bruit, faire partie de l'éducation.

La souffrance est une expression moins précise, car elle fait partie de la pensée C'est « l'idée qu'on se fait » de sa propre douleur, ou de celle des autres. Quand on dit «j'ai mal pour lui », c'est bien de la souffrance et non pas de la douleur …

Pour éviter ces ambiguïtés, tant pour l'homme que pour les animaux, il est préférable d'employer le mot savant de nociception, qui décrit l'ensemble du chemin physique (fibres, ganglions, circuits neuroniques) et des effecteurs chimiques (substance P localement, adrénaline, dopamine pour entretenir la douleur, endorphines pour la réduire, etc...), avec en bout de course, et dans l'encéphale, une synthèse de ces informations chimiques, avec la mémoire et les capacités émotionnelles du sujet.

Chez l'homme, on sait maintenant évaluer la douleur, grâce à deux modalités :

- la mesure de modifications significatives des grandes fonctions (tachycardie, hypertension, sudation palmaire, amplitude respiratoire...) et l'observation d'attitudes faciales ou de postures corporelles.

- L'échelle visuelle analogique une réglette qu'on présente au patient pour qu'il place lui-même le curseur au niveau du ressenti qu'il veut faire connaître.

Chez l'enfant (moins de 3 ans) ou l'animal, on ne peut juger que par notre observation extérieure, avec bien sûr toute la subjectivité due à l'idée que se fait l'observateur du phénomène douleur. Ainsi, on a longtemps cru que les bébés ne souffraient pas, puisque leur système nerveux n'était pas établi.

Chez les chats, on sait maintenant qu'ils sont plus « durs à la douleur », sans l'exprimer, et qu'il faut largement élargir le champ des traitements antalgiques dans cette espèce, sur des critères parfois insolites (malpropreté, sautes d'humeur...). Pour les animaux de rente, la douleur est inscrite dans les résultats d'exploitation : des bêtes qui souffert, font moins de lait ont une croissance moins rapide. Mais pour cet article, c'est le moment de l'abattage qui nous importe.

Les animaux, avant leurs derniers instants, sont tout d'abord rassemblés, transportés, puis à nouveau disposés dans des loges ou des couloirs qui mènent au lieu d'abattage Pendantes ces phases, l'anxiété est de mise, que l'on peut noter en observant la respiration, en dosant le cortisol ou l'adrénaline.

A ce niveau, on peut parler de souffrance, pas de douleur...

Avec cette contrainte : pas d'utilisation de tranquillisants chimiques, puisqu'on les retrouverai dans la viande Donc des animaux tendus, agités, qui s'effraient les uns les autres.

Et des mouvements, des querelles, et pour conséquences des traumatismes qui vont déprécier la carcasse. Pour un rabbin sacrificateur, la moindre pétéchie (petit hémato­me) lui fait refuser la certification de casher...

Puis l'animal parvient au piège de contention, une cage très élaborée pour bloquer l'animal et permettre les différents gestes de l'employé de l'abattoir.

C'est là qu'il est coincé, la tête à l'extérieur de cette cage, et qu'on effectue son étourdissement à l'aide d'un « matador », un pistolet à un coup qui entraîne une fracture du crâne, avec étourdissement immédiat de l'animal.

Comment fonctionne un animal étourdi ainsi ?

II ne meurt pas, son cœur continue de battre. II est inconscient et par là même, insensible à la douleur que pourrait entrainer la saignée qui va suivre.

Cette saignée réalisée (un geste technique, mais non codifié comme dans les rites d'abattage), l'animal est soulevé par les pattes pour être emmené plus loin sur la chaîne.

Dans le cas de l'abattage rituel, le box d'abattage est mobile, de manière à pouvoir être orienté vers l'orient (Jérusalem ou La Mecque) à l'instant du sacrifice. Puis a lieu l'égorgement, ouverture rapide et très large de l'avant du cou qui libère immédiatement les deux artères carotides avec le flot de sang correspondant. L'animal est agité alors de soubresauts qui sont supposés améliorer la vidange sanguine. Difficile de juger de la souffrance de l'animal dans ces instants : en quelques secondes, nous disent les religieux, le cerveau n'est plus irrigué, et la douleur n'est plus possible.

Voire ... La circulation cérébrale a bien été étudiée dans toutes les espèces par le Pr Ruckebush (ENV Toulouse) : elle est assurée par quatre grosses artères, les carotides sur le coté, et les art valides en arrière du cou. Le pourcentage relatif de sang entre ces artères dépend de l'espèce. Chez l'homme, les carotides sont prédominantes, c'est dû sans doute à notre station debout.

Mais chez les mammifères , une anastomose dtculaire (le « polygone de Willis), réunit les quatre vaisseaux pour « partager » le sang artériel. Ce qui fait (travaux de Ruckbush), qu'on peut clamper les artères carotides chez le chien ou le veau, sans pour autant obtenir de syncope. On ne peut donc compter sur un égorgement, aussi rapide, aussi large soit-il, pour affirmer que l'animal est aussitôt hors d'état de souffrir :

Engourdir ces animaux avant l'abattage les difficultés légales et cultuelles.

Nous voyons bien que ces animaux ont déjà un triste sort sur le chemin de l'abattoir (nb : nous n'envisageons ici que les abattages « officielles », dans des lieux et avec des personnes agréées. L'abattage clandestin est un sujet plus vaste et plus polémique...).

Rien qu'à ce niveau, ces bêtes mériteraient un traitement pour réduire leurs peurs, leur stress, leurs réactions de détresse Et ce n est pas possible, puisque les tranquillisants, comme tout médicament chimique absorbé dans les 72 heures, sera retrouvé dans la viande, donc dans l'assiette du consommateur. Donc les autorités ont fait le choix d'aménager les conditions de transport et de détention du bétail, et c'est tout …

Quant aux responsables qui gèrent les sacrifices, ils ne lâchent pas un pouce aux scientifiques, arguant que tout engourdissement, qu'il soit de type mécanique (matador) ou électrique (électronarcose, en particulier chez les volailles) n'offre aucune garantie de survie au moment du sacrifice.

Et que cette survie est fondamentale dans les textes de leur foi.

L'euthabattage les médecine naturelles pour réduire la souffrance animale

De fait, tous les professionnels de la viande, d'abattage rituel ou non, déplorent l'état de panique/désespoir des animaux au sein de l'abattoir.

Et si les médicaments chimiques sont hors course, les vétérinaires et éleveurs qui fonctionnent dans le bio connaissent bien toute une gamme de remèdes naturels et efficaces pour soulager l'angoisse des animaux. Que ce soit en cours d'élevage (préparation à la saillie, regroupement de bandes, introduction de nouveaux animaux), ou pour le transport.

Des thèses vétérinaires y sont même consacrées, qui montrent l'incidence de traitement homéopathiques, par exemple sur le nombre d'hématomes à l'abattoir sur des volailles comme les dindes ou les pintades. Avancer vers la transmutation de ces panique/désespoir muets (« leamed helplessness ») en une certaine sérénité, c'est possible, sans résidu, sans conflit idéologique, et avec une meilleure qualité de camasse, grâce à l'aide du règne végétal.

Un certain savoir faire est maintenant validé, pour proposer une méthode naturelle à appliquer sur plusieurs espèces, en amont du voyage sans retour.

II existe, comme pour tout protocole d'homéopathie ou de phytothérapie, plusieurs options en fonction de l'espèce, et du temps de parcours.

En pratique: à la ferme, ou au lieu de rassemblement la veille, et le matin du (grand) départ - dans un peu d'aliment plantes sérénisantes : tilia tomentosa MGB 1DH vingt ml, valériane teinture mère ou extrait de plante fraîche standardisé EPFS dix ml, passiflore t.m. ou epfs dix ml. Vous connaissez ? Bien sûr, il s'agit globalement de la formule de deux des remèdes naturels les plus vendus en France, à savoir Euphytose et la Spasmine, des remèdes pris par des millions de français, athées, catholiques, israélites ou musulmans, et qui s'endorment tranquillement sur ces prescriptions médicales ... Pourquoi en priver nos biftecks encore vivants ?

- dans l'eau de boisson : « Rescue » le remède de secours du Dr Bach (aucun souci si abreuvoir collectif, aucun goût, ce remède agit uniquement par voie énergétique)

- pour les bovins, il est également bien efficace de déposer sur le dos de l'animale un mélange d'huile de table et d'huiles essentielles neurotropes : 30 parties d'huile végétale pour une partie d'huile essentielle de lavande, de lavandin, de marjolaine, de géranium et (ou) de basilic. L'huile pénètre en quelques minutes à travers le cuir et commence son action pour plusieurs heures. Attention PAS par la bouche!

Dans le camion de transport :

- Les huiles essentielles de citrus (zeste de citron) peuvent être vaporisées dans le camion avant le transport, elles sont désinfectantes et apaisantes.

- Des phéromones synthétiques, dites « apaisines », efficaces chiens et chats (DAP, feliway), chevaux, sont à remettre sur le marché pour les grandes espèces, et à vaporiser sur loges, licols, et animaux eux mêmes.

- l'anxiolyse par voie acoustique (musique classique sérénisante, ou enregistrements d'oi­seaux en milieu naturel), est déjà utilisée par certains transporteurs, et doit être généralisée : ici aussi, aucun résidu, et coût nul !

Au débarquement du camion ici encore, dans l'eau d'abreuvement, quelques gouttes du remède "Rescue" du Dr Bach

Dans les locaux d'abat­tage :

Ici encore, musique sérénisante, et huiles essentielles en aérosols et diffuseurs (les humains en bénéficieront également) et à l'examen des carcasses, le taux de purpu­ra devrait tendre à zéro....

II y a toujours mieux à faire. Au plan architectural, concevoir les locaux afin de ne pas faire attendre les animaux "au spectacle" de l'abattage des autres ... Une certaine retenue de la part du personnel serait également la bienvenue.

Mais l'euthabattage, ce protocole qui allie le respect aux sacrifiés, aux impératifs économiques d'une société carnivore, est déjà en route dans les esprits, et dans les faits.

Ce protocole n'est exigeant ni en temps, ni en coût, au grand maximum huit euros par bovin, trois pour un ovin. C'est peu pour un acte avant tout moral, mais qui se remboursera sur la qualité des carcasses, et sur leur valeur si un label sérieux en accom­pagne le déroulement.

Interview d'un éleveur de vaches laitières

Il est de primordial importance pour nous éleveurs d'éviter les souffrances pour animaux qui ont eu avec nous toute une carrière - mais que malheureusement nous ne pouvons garder jusqu'à leur dernier souffle. Quand une de nos vaches doit partir, nous lui donnons et la veille au soir et le lendemain matin dans l'aplati ou le concentré, le mélange "Tivapa" (tilleul bourgeon, valériane TM, passiflore TM) à dose conséquentes : 40 ml de bourgeon tilleul, 20 ml de chacune des deux teintures mères valériane et passiflore. Entre deux couches de concentré ou d'aplati. On attend quelques minutes avant de "servir", que l'odeur des plantes s'atténue un peu par évaporation. Mais de toute façons, c'est en général très vite et très volontiers avalé Quand vient l'heure d'emmener l'animal jusqu'au point d'abattage, de rassemblement, ou au camion de transport, il se trouve alors relaxé sans être endormi et les choses se passent sans difficulté. Cela fait maintenant des années que nous procédons ainsi. Il y a maintenant pour elle comme pour nous un certain plus de sérénité et dorénavant, il ne nous viendrait pas à l'idée de revenir en arrière.

Jean-Yves Gauchet.

Article tiré de la Revue EfferveSciences (reproduction autorisée).




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